« Vivre la ville autrement… » est le mot d’ordre à Lyon. Dans le cadre de leur politique de développement des « transports doux », la ville et la communauté urbaine de Lyon ont mis en place depuis le 19 mai 2005, une opération sans commune mesure en Europe : « Vélo’v ». Car « pour vivre la ville autrement, il faut s’en donner les moyens ». A Lyon, c’est chose faite. Initiative unique en Europe par son ampleur, « Vélo’v », est la mise à disposition, en libre service, de près de 2000 vélos sur près de 200 stations pour tous les habitants et usagers du grand Lyon. Entretien avec Gérard Collomb, maire de Lyon et sénateur du Rhône, sur cette opération au succès incontestable.
D’où vous est venu l’idée de l’opération « Vélo’v » ? Etait-ce un besoin exprimé par la population ou une initiative municipale?
C’est une initiative municipale puisque nous avions inscrit « le développement de l’usage du vélo dans la ville » dans notre programme municipal. Cette volonté se déclinait alors, sur deux axes complémentaires : la création d’itinéraires cyclables sûrs, et la mise à disposition de vélos « publics ». Nous avons réalisé l’un et l’autre, et le fonctionnement montre combien cela répond en effet, à un souhait des habitants.
En quoi consiste concrètement l’opération « Vélo’v » ?
Nous avons mis dans notre cahier des charges pour le renouvellement du mobilier urbain, une exigence de mise à disposition de bicyclettes pour les Lyonnais. Deux sociétés ont fait des propositions et Decaux l’a emporté. Le système est le suivant : il y a des stations dans toute la ville (environ 200 aujourd’hui), et n’importe quel usager peut retirer un vélo puis, le déposer dans une autre station, à proximité de sa destination. Il dispose de 30 minutes gratuites. Tout le dispositif est bâti sur la rotation maximale, un vélo déposé dans une station étant immédiatement accessible à un autre usager. Decaux, qui est propriétaire du dispositif, régule le remplissage des stations en ajoutant des vélos là où les stations sont vides.
Quel bilan tirez-vous de l’opération « Vélo’v » lancée en mai 2005, il y a maintenant 10 mois ?
Dès le mois d’octobre, nous avions environ 17.000 utilisateurs quotidiens… C’est énorme. Cela signifie que chaque vélo sert en moyenne 7 ou 8 fois par jour ! La ville a changé d’aspect. Il y a beaucoup plus de vélos et les automobilistes ont progressivement modifié leur comportement. A vrai dire, c’est un magnifique succès qui va au-delà de nos prévisions. De plus, l’offre « Vélo’v » a, dans le même temps, désinhibé les cyclistes occasionnels qui disposent de leur propre vélo. Ainsi, Lyon a vu s’épanouir à la fois les « Velo’v » et les bicyclettes de tout un chacun. Un autre élément à souligner, qui constitue aussi une belle victoire à mes yeux, est l’appropriation complète des « Velo’v » par les Lyonnais. Aujourd’hui, on peut même dire que la « communauté des véloveurs » est à l’image de toute la population lyonnaise : des jeunes, des personnes âgées, des hommes en costume et des étudiants en jeans…
Pensez-vous développer cette initiative ?
Aujourd’hui, la demande est très importante et a dépassé l’offre à certains moments. Nous avons donc décidé l’extension du dispositif, avec la mise à disposition de 3000 vélos d’ici l’été, et la création de 70 nouvelles stations. Nous irons sans doute plus loin encore en 2007. Notre effort principal pour les années qui viennent portera sur les itinéraires cyclables. Dès 2007, une grande traversée de la ville du nord au sud sera créée le long du Rhône. C’est cette conjugaison d’actions qui garantira l’émergence du déplacement cycliste, et qui permettra de modifier sensiblement les parts de marchés des modes de déplacement.
Quel conseil donneriez-vous à une ville qui voudrait reprendre l’opération Velo’v et la mettre en place dans sa propre commune ?
Je dirais d’abord qu’une telle mise en place exige beaucoup de volonté. Certes, les résultats sont là. Mais l’implantation des stations peut donner lieu à de longues discussions, et il y a toujours mille raisons, comme pour tout grand projet, de ne pas aller jusqu’au bout.
Par ailleurs, il faut y consacrer les moyens nécessaires, et ceux-ci sont importants. En effet, le système repose d’abord sur la densité du nombre de stations et de vélos mis à disposition. On ne peut pas y aller à moitié, car le produit ne serait pas attractif, pas pratique, pas ergonomique… et ne connaîtrait donc pas le succès attendu.
Malgré cela, c’est un formidable enjeu de développement durable et une action efficace et pragmatique pour encourager à l’usage d’autres modes de déplacement que la voiture. Et si on respecte les conditions évoquées précédemment, ça marche. Alors… allez-y ! !
Pour preuve, Lyon reçoit de nombreuses délégations qui veulent voir le dispositif « Velo’v ». Nous accueillons volontiers tous ceux qui nous en font et feront la demande.
Propos recueillis par Clémence Bahin
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